Intervention d‘Arnaud Montebourg, président de l’Association France Algérie lors de la remise des prix Bouamari-Vautier


Paris le 23 janvier 2020

Chers Amis,

Je voudrais d’abord remercier Madame Nathalie Coste-Cerdan , directrice générale de la FEMIS, de nous accueillir ici ce soir. La FEMIS, Ecole nationale supérieure des métiers de l’image et du son est notre grande institution publique de formation à tous les métiers du cinéma et nous sommes fiers de la mission qu’elle accomplit avec brio.

Elle accueille notamment de nombreux étudiants étrangers, venant notamment d’Algérie, pour bénéficier d’une formation qui fera d’eux les cinéastes de demain. Je veux aussi remercier les personnalités présentes, parmi lesquelles, M. Jean-Pierre Chevènement, M. Serge Toubiana, président d’Unifrance, Mme Marjorie Vella, Directrice adjointe aux programmes de TV 5 Monde, Mme Maya Akkari, maire-adjointe du 18ème arrondissement, Mme Aicha Mokdahi, présidente de l’association Atlas, Mme la directrice par interim du Centre Culturel Algérien de Paris et beaucoup d’autres amis.

L’Association France Algérie a été fondée dès 1963 sur une idée de Germaine Tillion, soutenue par le général de Gaulle, afin de maintenir, après l’Indépendance, des liens entre les sociétés algérienne et française. Elle a été présidée d’abord par Edmond Michelet, puis par des personnalités comme Stéphane Hessel, David Rousset, Jean Charbonnel, Pierre Joxe, Bernard Stasi, Jean-Pierre Chevènement.

Aujourd’hui comme hier nous sommes aux côtés de ceux qui veulent la liberté pour l’Algérie. Le mouvement populaire qui s’est levé depuis février 2019 dans tout le pays commence à dessiner l’Algérie de demain. Succès immense d’une mobilisation sans précédent. Non seulement elle est parvenue, sans effusion de sang et sans violence, à mettre fin à un régime en fin de parcours, mais elle fixe le chemin à venir pour faire entrer l’Algérie dans une ère nouvelle. Déjà la libération de nombreux détenus, la désignation d’un Premier ministre modernisateur, l’entrée au gouvernement de personnalités qui avaient dénoncé les abus anciens, l’arrivée de jeunes talents, montrent que les aspirations au renouveau commencent à se réaliser. Dans le domaine économique, dans la lutte contre la corruption, les premières mesures tranchent avec le passé. La préparation d’une nouvelle Constitution correspond aussi aux exigences du mouvement populaire. L’Algérie veut prendre un nouveau cap. Et, disons-le, sans le hirak, rien n’aurait été possible. La force impulsive qu’il continue de détenir va poursuivre son cours, pour faire entrer l’Algérie dans une période nouvelle où la prééminence du civil sur le militaire devra être garantie, et l’indépendance de la justice affirmée. Certes, la nouvelle République algérienne qui est en train de naître sous nos yeux n’a pas fini sa mue ; l’élection d’un nouveau Parlement devra s’imposer rapidement afin de faire entrer la société en mouvement dans les institutions. Le mouvement populaire aura à structurer sa représentation politique sur la scène démocratique, les mesures de confiance comme les amnisties et les libérations de détenus doivent se poursuivre. Les forces qui s’opposeront à cette mutation ne se tairont pas car les tenants de l’ordre ancien n’ont pas abdiqué. Mais nous affirmons notre confiance dans l’avenir de l’Algérie. Le peuple a offert un magnifique exemple de maturité politique, de sagesse, de refus de la violence qui a étonné le monde, et nous devons souhaiter que les nouveaux dirigeants recherchent le dialogue constructif nécessaire pour réconcilier toutes les forces de progrès. Confiance et espoir éclairent ce début d’année 2020 !

Nous décernons aujourd’hui le prix Bouamari-Vautier créé par notre Association pour saluer le travail des nouveaux réalisateurs, et pour faire mieux connaître le cinéma émergent d’Algérie. Car s’il y a peu de salles de projection, il y a beaucoup de talents ! Ce prix est sous la double invocation de Mohamed Bouamari, né à Lyon, et qui avait regagné l’Algérie en 1965, après l’Indépendance. Après avoir travaillé aux côtés de Mohamed Lakhdar Hamina, de Gillo Pontecorvo, de Costa-Gavras, de Jean-Louis Bertucelli,  il avait réalisé de superbes films comme Le Charbonnier, L’Héritage ou Premier pas. Et je suis très heureux de saluer la présence de sa fille Moufida parmi nous ce soir. René Vautier, ancien Résistant, décoré de la Croix de guerre à seize ans, était un réalisateur courageusement engagé pour la liberté du peuple algérien et pour l’Indépendance ; c’est l’auteur d’Avoir vingt ans dans les Aurès, avec notamment Alexandre Arcady qui est aujourd’hui membre de notre jury, ou encore de Un peuple en marche, en 1963. C’est dire que ces deux figures tutélaires éclairent le message que nous voulons transmettre en honorant les créateurs d’aujourd’hui.

Mes remerciements vont à Flora Boumia et Nicole Lefour qui ont organisé ce prix et cette cérémonie amicale. Notre association est animée exclusivement par des bénévoles, et je sais gré spécialement à Flora et Nicole du travail qu’elles ont accompli pour ce prix Bouamari-Vautier.

Un jury a été constitué, composé d’Alexandre Arcady, réalisateur, de Dominique Cabrera, réalisatrice, de Nadir Mokhneche, réalisateur, de Mohamed Kacimi, écrivain et dramaturge et Denise Brahimi, universitaire. Il s’est réuni le 13 janvier dernier autour des quatre films sélectionnés : Abou Leila, d’Amin Sidi –Boumédiène, Derwisha de Leïla Beratto et Camille Millerand, Fragments de rêves, de Bahia Bencheikh-El-Fegoun et Papicha, de Mounia Meddour. J’invite les membres du jury à nous rejoindre sur la scène, et je demande à Flora Boumia de nous apporter l’enveloppe secrète :

 « Le jury attribue le prix Bouamari-Vautier au film Papicha de Mounia Meddour.

Le jury souhaite qu’un prix spécial « documentaire » soit créé par l’Association et attribué à Derwisha de Leïla Berrato et Camille Millerand. »

Après en avoir brièvement délibéré avec notre trésorier Arthur Couvreur, je vous annonce que l’Association répond au vœu du Jury. J’appelle donc à nous rejoindre :

–              Mounia Meddour

–              Leïla Berrato et Camille Millerand.

Evidemment, le montant de ce prix demeure de l’ordre du symbole. Nous sommes des bénévoles et nos moyens sont des plus modestes. Mais je suis très heureux qu’il contribue à honorer votre travail, et à faire mieux connaître le nouveau cinéma algérien.

Arnaud MONTEBOURG,

Président

Association France Algérie


janvier 27, 2020